Tiré du livre d'Henri Broch "Au coeur de l'extraordinaire" ISBN : 2951757301 (page 167)

(NDLR : ^ signifie "puissance")

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Les dilutions délirantes de l'homéopathie

"Plus le principe actif est dilué, plus forte est son action" : telle est une des pierres de base de l'homéopathie.

Un point essentiel qu'il faut souligner est que l'utilisation d'une terminologie du style "Nux Vomica 20 CH", "Rhus tox. 15 X", permet aux homéopathes de laisser supposer qu'un produit est infiniment sécable en parties de matière identique, ce qui bien sûr, n'est pas le cas.

Prenons l'exemple d'un "principe actif" homéopathique dont la masse molaire serait d'environ 60 grammes.

- 1 centigramme de cette substance contient de l'ordre de 10^20 (c'est-à-dire 1 suivi de 20 zéros) molécules.

- A partir de cela vous faites une dilution 1 CH qui vous permet de préparer 100 flacons contenant chacun environ 10^18 molécules. Vous prenez un flacon et vous continuez les dilutions...

- Vous obtenez ainsi, par exemple, une dilution 4 CH qui vous offre 10^12 molécules par flacon. Si ce nombre de molécules est grand, il faut toutefois signaler qu'il correspond ici à une masse inférieure au nanogramme qui semble être l'ordre de grandeur de la limite d'action d'un produit sur un organisme humain.

- Avec beaucoup beaucoup de chance (probabilité inférieure à 10^-42 !!), vous arrivez à une dilution 10 CH qui vous permettra de faire 100 flacons avec chacun 1 molécule de produit "actif".

- A partir de là, la molécule n'étant pas divisible en entités équivalentes, en diluant encore vous obtenez une dilution à 11 CH où un flacon contient une seule molécule de produit "actif" et 99 flacons ne contiennent... RIEN, à part le solvant!

- En poursuivant ainsi, vous arrivez, pour 15 CH de ce produit, à 10 milliards de flacons, nombre sur lequel un flacon contient une molécule et 9.999.999.999 flacons ne contiennent strictement RIEN.

Vous imaginez ce que cela signifie pour les dilutions encore plus hautes...

En termes clairs, pour les dilutions les plus "classiques", ce que les tenants de l'homéopathie vous vendent, contre monnaie sonnante et trébuchante (la monnaie papier est tout de même acceptée), et contrairement au nom du produit que l'emballage porte, c'est un produit qui se nomme... RIEN!

En d'autres temps, on aurait pu appeler cela de l'escroquerie.

Ce rien se vend d'ailleurs très bien et rapporte gros, d'autant plus gros que l'on ne peut pas dire que la masse présente (zéro) de produit actif soit très coûteuse

L'homéopathie est-elle totalement inoffensive?

L'homéopathie, comme toutes les médecines magiques, n'est pas si inoffensive que cela. Les thérapeutiques des guérisseurs, quel que soit le nom plus ou moins pompeux qu'ils se donnent et quelle que soit l'innocuité de leurs techniques, sont nocives car elles peuvent détourner ou empêcher le patient d'accéder à un traitement correct de sa maladie.

"Des malades graves qui mettent leur confiance dans des thérapeutiques illusoires, retardent le moment où ils seront soignés véritablement. Un éminent chercheur du CNRS nous signalait dernièrement les dégats causés par l'homéopathie dans des affections qui exigent, parfois de façon urgente, les thérapeutiques efficaces dont dispose aujourd'hui la médecine scientifique. En une semaine.., il avait ainsi vu trop tard - un cancéreux et un urémique, tous deux dans un état grave au moment où il les avait vus : l'un et l'autre se soignaient depuis deux ans par homéopathie" ...(Rouzé 1985 d).

Conclusion

La conclusion sereine qui se dégage de l'ensemble des données est, pour le point de vue strictement médical, celle qu'ont faite les docteurs Bardelay et Aulas : "Si l'on s'en tient aux seuls éléments aujourd'hui disponibles, l'homéopathie apparaît comme un système thérapeutique complexe n'ayant pas fait la preuve qu'il était autre chose qu'une optimisation importante de l'effet placebo en rapport avec une relation médecin-malade particulière et une prescription personnalisée".

Cette conclusion s'imposant d'elle-même, il nous faut aller jusqu'au bout de la démarche et en tirer, après réflexion, les conséquences et les actions à entreprendre tant du point de vue de la médecine que du point de vue culturel, du point de vue social.

Au risque de faire encore plus bondir certains lecteurs déjà courroucés à la lecture des lignes qui précèdent, j'insiste sur le fait qu'il existe une parenté très étroite, comme je l'ai souligné à plusieurs reprises dans ce chapitre, entre la croyance à l'homéopathie et la croyance aux phénomènes "paranormaux", entre le comportement des personnes et des "chercheurs" impliqués dans l'un et l'autre de ces deux "domaines". Le recours sans fondement aux toutes dernières théories scientifiques et à leurs débordements pour tenter de donner une base à ces illusions ne fait que confirmer cette parenté.

L'homéopathie, que l'on pourrait être tenté, comme certains, d'intituler psycho-thérapie déguisée, peut représenter un frein à l'évolution de la médecine et, de par sa démarche même, doit être rangée dans le domaine qui lui est propre, celui des pseudo-sciences.

Cette pseudo-science a même réussi, comme cela est souvent le cas des théories "paranormales", à produire elle-même d'autres pseudo qui, rejetés par les tenants de la "vraie" homéopathie, rapporteront à ces derniers une auréole de véracité.

L'homéopathie a ainsi donné naissance à des délires intitulés "thérapeutiques biothérapiques d'expression hahnemanienne" comme l' organothérapie (dilution d'organes), la gemmothérapie (bourgeons végétaux aux indications thérapeutiques indiquées par un pendule de radiesthésiste) et la lithothérapie déchélatrice (analogie entre l'embryon humain et la géologie terrestre).

Ces délires peuvent néanmoins fournir des "remèdes" remboursés par la Sécurité Sociale !!!!!!!

"Pauvres médecines douces, qui peuvent s'offrir des pages entières de publicité dans des quotidiens ! Pauvre homéopathie, dont le chiffre d'affaires... augmente de 20% chaque année ! En grande partie, rappelons-le, à la charge de la Sécurité Sociale. Pendant que la recherche sur le cancer doit organiser des quêtes sur la voie publique..." (Rouzé dans Rossion 1985 a).

Pour la nécessaire réflexion sur l'homéopathie et ses substances, voici les points d'appui que je vous propose:

  • Chiffre d'affaires 1990 des laboratoires homéopathiques français pour les seuls produits médicamenteux: plus de 1.100.000.000 F !
  • Classification dans le Codex Rouzé : "Pulvis Perlimpinpini"

Références

Aulas et al (1985); Besse (1986); Coers (1985); Gounelle de Pontanel (1985); Gounelle de Pontanel et al. (1989); Murrieta et al (1985); Rossion (1985 a, 1985 b, 1985 c); Rouzé (1984 g, 1985 b, 1985 d, 1985 f, 1985 g, 1986 a, 1986 b); Shipley et al (1983); anonyme (1985 b, 1985 f)

Biographie de l'auteur

Henri Broch est Docteur ès sciences et Professeur à l'université de Nice-Sophia Antipolis où il enseigne la physique et la zététique. Spécialiste internationalement reconnu de l'étude des phénomènes "paranormaux", il est membre du prestigieux CSICOP (Committee for the Scientific Investigation of Claims of the Paranormal) des Etats-Unis dont il a reçu en 1990 le "Distinguished Skeptic Aword" pour l'ensemble de ses travaux sur la question. Il a aussi ublié avec Georges Charpak (prix nobel de physique) "Devenez sorcier, devenez savant" (ISBN : 2738110932).

Tiré du site pseudo-medecines.org

Tout élève qui est passé, ne serait-ce que près du radiateur, dans une classe de chimie de lycée, se souvient du fameux nombre d'Avogadro. Ce nombre, aux allures magiques, (6,023 10^23) représente le nombre de molécules vraies existant dans une mole. Or, à la première dilution, on ne garde que 1/100 des molécules (10^-2), ce qui signifie qu'au delà de 10^-24 (12CH), il ne reste aucune molécule de la solution initiale, d'autant que la goutte de départ était loin de contenir une mole, et que la solution mère elle-même était en grande partie constituée de solvant. En fait on doit considérer que toute dilution supérieure à 8 ou 9 CH ne contient plus rien.

Alléguer que la connaissance de la matière n'est pas achevée n'est que mauvaise foi et incompétence. Les physiciens ont en effet, depuis longtemps, franchi la barrière de la molécule et de l'atome, pour répertorier les particules élémentaires, et ils voguent aujourd'hui gaiement dans l'antimatière. Pourtant, ni l'un ni l'autre de ces domaines ne peut intervenir au niveau d'une banale réaction biochimique.

En résumé, le médicament homéopathique ne contient "rien".

Liens utiles

Le site de l'université de nice consacré à la zététique a un dossier fort instructif contenant notamment du matériel pédagogique. On peut aussi lire d'autres articles :

Version anglaise :

Clinical effects of homoeopathy are placebo effects. The evidence for a specific effect of homoeopathic remedies is weak, according to a study. The investigators conclude that the clinical effects of homoeopathy are compatible with placebo effects. Aijing Shang and colleagues compared randomised placebo-controlled trials of homoeopathy with matched RCTs of allopathy. When the analysis was restricted to large trials of high quality there was no convincing evidence that homoeopathy was superior to placebo, whereas for conventional medicine an important effect remained. The Lancet

Du rabe

Une autre fois, quand j'aurai le courage de scanner d'autres textes, je vous parlerai aussi d'acupuncture, de radiésthésie, d'astrologie : vous l'avez deviné, tout ce que j'aime...