Attention, ça n'est pas un horoscope, hein, pour savoir si oui ou non tu vas attraper ton joli collègue cette année. On a dit une loi statistique, baptisée loi de Cupidon et développée par Loïck Roche, docteur en philosophie, conseiller auprès de DRH de grands groupes. C'est même quasi inéluctable, explique l'auteur : au travail, on rencontre plein de gens hors de son cercle habituel, on y passe la majeure partie de son temps réveillé, utile (et maquillé, lavé, habillé correctement). Un indicateur, souligne Loïck Roche : «J'ai été frappé de constater le nombre d'histoires qui se nouent dans les entreprises qui sont fortement innovantes et où les personnes semblent le plus passionnées par ce qu'elles font.» On peut en conclure que l'entreprise va d'autant mieux qu'il y a plein d'histoires de cul. Quelques fondamentaux.
«Relation sexuelle» ou «relation intime» ?
Les études sur les relations intimes (sur le lieu de travail ou ailleurs) sont difficiles, pour ne pas dire impossibles. A la question «Combien de fois par semaine faites-vous l'amour ?», les Français répondent grosso modo «deux fois». Tout sauf vrai, à moins de préciser «pas forcément avec votre conjoint».La relation sexuelle se réfère à l'acte sexuel proprement dit mais aussi aux attouchements ­ une personne touche la partie sexuelle d'une autre personne avec une partie de son corps (main, bouche, je te passe le détail...) ­ et inclut les «baisers amoureux».La relation intime, elle, inclut les baisers dans le cou, jusqu'aux baisers au coin de la lèvre, les caresses sur la joue, dans le dos, sur la main. C'est plus clair ?
Combien de couples dans une entreprise ?
Grâce à la loi de Cupidon, chaque personne, en fonction de son ancienneté et du nombre de personnes que compte son environnement professionnel, va avoir un nombre précis de relations intimes avec ses collègues. On l'aura compris, ça ne vaut évidemment pas si je suis le seul salarié de ma boîte... Cette loi, dans sa définition la plus générale, veut qu'une personne ait un partenaire sexuel différent parmi les personnes de son entourage professionnel tous les sept ans d'ancienneté. Pour calculer dans votre entreprise, administration ou collectivité le nombre de «couples»  qui se sont formés et dont les protagonistes sont encore présents dans l'entreprise, il faut donc connaître le nombre de personnes de la structure et l'ancienneté moyenne.
Un exemple, un exemple ?
Soit une entreprise de 200 personnes, avec une moyenne de cinq ans d'ancienneté. Si on applique la loi de Cupidon, on obtient 75 relations entre des paires de personnes différentes (150 salariés sont concernés). Voici l'opération : 200 salariés x 5 ans d'ancienneté moyenne, le tout divisé par 7. Pourquoi 7 ? Parce que, explique l'auteur, c'est la durée moyenne d'une relation entre humains. Attention, on parle là de relations sexuelles.
Calculons maintenant le nombre de relations intimes. Cette fois, il faut multiplier par 3 le nombre de salariés concernés, soit 150, et à nouveau diviser par 200 (oui, le nombre de salariés total). Au final, si il y en a qui suivent encore, ça fait que chaque homme ou femme a eu (en moyenne) une relation intime avec deux collègues. On ne s'emballe pas, nonobstant : comme toujours, il y a ceux qui cumulent les aventures (qui vont avoir trois, quatre, voire davantage de love affairsdans le cadre du travail)... et les autres, qui les comptent.
Vaut-il mieux être chef pour avoir des aventures ?
Une étude américaine montre qu'une femme sur deux ayant eu une aventure amoureuse sur son lieu de travail a eu cette aventure avec son chef direct... Le pouvoir rend plus séduisant, c'est connu. Surtout, ça nourrit un fantasme. Pour le subordonné, cela correspond au fantasme de «posséder» l'autre et, d'une certaine manière, de le diriger : c'est donc une inversion de la position «hiérarchique». Pour le supérieur, cela correspond à un fantasme de mise en danger, parce que l'autre va connaître de lui une vérité intime. On comprend que, si la relation doit se terminer un jour, le manager peut prier pour que la relation se termine bien... Or il peut s'attendre à tout. C'est d'ailleurs pour cela qu'il s'organise souvent pour se débarrasser de cette personne dans sa vie privée et en même temps dans sa vie professionnelle. A éviter, le chef.
Comment accélérer les coucheries ?
Le problème, à vouloir séduire sur son lieu de travail, c'est le risque d'être rejeté. Il faut trouver des prétextes. Les pots alcoolisés peuvent permettre, en cas de râteau, de se dédouaner d'un «ouh là là, excuse-moi, je n'étais pas dans mon état normal». Sous l'emprise de la caipirinha, on peut se déclarer, faire des propositions, tenter des choses, des gestes... L'alcool sur le lieu de travail joue le même rôle que lors de soirées ou dans les boîtes. Tenter les blagues, aussi : si autrui veut bien rire de mes blagues, c'est que je peux peut-être tenter d'aller plus loin. Notre conseil : risquer les plaisanteries lourdingues soûl comme un goret au Friday pot.


Par Emmanuèle PEYRET
© Libération du mardi 16 janvier 2007